DRAGUE AU PONT-JETÉE LASALLE

Adresse : 1 Place des Armes

Pendant la Seconde Guerre Mondiale, des milliers de soldats de sexe masculin inondèrent la Base des Forces canadiennes de Kingston (encore une présente) pour y travailler et s’y entraîner. Leur présence offrait de grandes occasions d’échanges érotiques encouragés par l’anonymat d’être dans un environnement dominé par les hommes, loin de chez eux.

Dans son livre révolutionnaire « Sortir du placard sous les tirs » (Trad. Coming Out Under Fire), Alan Bérubé étudie comment les conditions sociales provoquées par l’environnement physique et psychologique pendant la guerre amenaient à la découverte d’un désir envers des personnes de même sexe. Le dépistage psychiatrique des signes d’homosexualité des recrues et les politiques anti- homosexuelles de l’armée poussèrent fermement le discours public à aborder le désir de même sexe, offrant un jargon sur les sentiments qui aurait auparavant été tacite ou même méconnu.

Henry passa ses années de guerre à Kingston à travailler dans un centre d’expédition pour l’armée. Il décrivit cette période comme «très ouverte», se délectant de la facilité avec laquelle il eut des liaisons homosexuelles. Les hommes trouvaient des partenaires sexuels dans les camps de formation, lors des défilés militaires, ou en flânant sur la rue Princess.

«J’allais simplement voir quelqu’un qui me plaisait et je lui parlais sans être trop évident et s’il n’était pas intéressé, je laissais tomber», se souvient Henry, estimant qu’au moins cinquante pour cent étaient «intéressés». Henry précise que cet «intérêt » ne signifiait pas nécessairement que cinquante pour cent des soldats étaient gays. Il faisait la distinction entre les «gays», dont l’homosexualité était constituée de leur transgression de genre en association à leur désir de même sexe, et les hommes «hétérosexuels» qui consentaient à des relations de même sexe, mais conservaient une identité uniquement masculine.

Lorsque la guerre fut finie, une forte présence militaire resta à Kingston. Le passage des hommes entre la base et le centre-ville, une petite section de l’autoroute n°2, se transforma en une zone de drague.

Earl se rappelle: Quand je suis arrivé ici [en 1962], il y avait 6500 hommes sur la base militaire. La ville était remplie d’hommes qui portaient toujours des vêtements civils en soirée. L’armée comptait beaucoup d’homosexuels. Oh et l’un des grands passe-temps était d’entrer dans votre voiture, conduire jusqu’au pont-jetée LaSalle. Les bars fermaient vers minuit, minuit et demi et la plupart des gars devaient être de retour à la même heure. Étant militaire, ils étaient à court d’argent, trop peu payés et devaient marcher pour se rendre jusqu’à la colline. Ainsi vous vous arrêtiez, offriez un ride et ils finissaient toujours par revenir beaucoup plus tard que ce qu’ils auraient dû… C’était une véritable zone de drague à cette époque, de la S & R (un grand magasin au centre-ville, au commencement de l’autoroute 2), au pont-jetée LaSalle et jusqu’à la colline. Oh oui, beaucoup, beaucoup d’homosexuels étaient dans l’armée. »


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